LES JEUNES

 

Ils étaient une dizaine au commissariat, l’air embêté, certains ne comprenaient même pas où ils se trouvaient tellement la soirée avait été arrosée. Pourtant ils étaient habitués, tous les samedis ils se retrouvaient chez les uns ou les autres, les boissons descendaient assez rapidement, les drogues douces aussi. Ils ne se sentaient pas fautifs, le lundi ils reprenaient le collège ou le lycée, passaient d’une classe à l’autre et les parents ne savaient rien ou ne voulaient pas savoir.

Pourquoi ce soir, la police a fait une descente chez Marc ? Il  était comme les autres ni pire, ni mieux ; l’appartement était celui de ses parents. Ils étaient partis quelques jours et le lui avaient laissé.

Ceux qui ne comprenaient pas pourquoi la descente de police se fit chez Marc ne savaient pas tout. En principe, le chauffeur ne buvait pas ou très peu. Marc avait proposé de ramener sa copine, elle était très mal, en cours de route il se fit arrêter, la fille fut envoyée à l’hôpital ; les policiers ont voulu voir l’appartement de Marc. Quand il entrèrent ils virent les nombreuses bouteilles vides, ils comprirent vite fait que la drogue douce circulait facilement ; ils arrêtèrent les jeunes qui avaient bu, il y en avait une dizaine sur douze. Les deux autres étaient chauffeurs et ne buvaient pas cette fois-ci.

Les jeunes attendaient en prison que leurs parents viennent les chercher, les policiers avaient téléphoné aux parents de chacun pour les prévenir ; certains n’avaient que treize ans !

Il y eut un coup de fil et un inspecteur dit aux jeunes :

-         Votre copine vient de mourir, elle a eu un coma éthylique, vous savez ce qu’il faut faire si vous voulez suivre le même chemin.

Aucun jeune ne dit un seul mot, ils se regardaient morveux, certains étaient dégrisés ; tous connaissaient la petite Nathalie, l’amie de Marc, elle n’avait pas seize ans. Mimi dit tout fort « C’st trop injuste » Le commissaire haussa les épaules, les beuveries des jeunes, leurs overdoses il en avait plus qu’assez. Il ne les comprenait pas, dans le temps lui aussi sortait et s’amusait mais jamais il n’avait eu un coma éthylique pas plus que ses copains, la drogue ils ne connaissaient pas. Il les regarda, « Ils nous ressemblent avec leur air penaud, quelle bande de cons ! » Il ne voulait pas leur parler ni s’attacher à eux, c’est trop dur de voir un gosse mourir aussi stupidement.

Les premiers parents arrivaient, ils avaient l’air de débarquer :

-         Mon fils, pas possible, il ne boit jamais ;

-         Demandez-lui, on a dû le faire boire de force disait l’inspecteur.

Les gamins ne disaient rien devant les parents, ils baissaient la tête, promettaient de ne plus recommencer, d’autres disaient qu’ils s’étaient fait piéger. Un seul envoya sa mère dans les roses en lui disant qu’il serait majeur dans trois mois et qu’il ferait ce qu’il veut.

La mère pleurait, elle ne savait plus comment le prendre ; l’inspecteur pensa « Encore un qui va se retrouver derrière les barreaux en tant que délinquant dans peu de temps »

Marc fut le seul à passer la nuit au commissariat, le lendemain matin, un policier le raccompagna chez lui. Il savait que ses parents le sauraient, il ne pourrait plus sortir, il avait aussi de la peine pour sa copine morte, il ne pouvait rien faire, c’était trop tard ; brusquement il pensa « Si je ne bois plus, je ne prend plus de drogue douce non plus, cela rachèterait un peu la mort de Nathalie, je pourrai aussi convaincre certains de ne plus abuser » Avec ces bonnes résolutions il attendit ses parents.

Le lendemain il eut une discussion très animée de la part de ses parents, il s’y attendait et ne dit rien. Ses copains l’attendaient dehors, ils avaient un plan pour aller dans une boîte de nuit sans se faire remarquer. Il les écouta puis dit calmement :

-         C’est fini pour moi, je ne veux pas finir comme Nathalie, j’arrête tout : l’alcool et la drogue, vous faites ce que vous voulez, je ne sors plus.

Une seule fit comme lui, Corine, elle avait déjà connu le coma éthylique, elle avait peur de ne pas savoir s’arrêter ou trop tard. Marc savait qu’il ne réussirait pas à convaincre tout le monde, mais une personne c’était déjà pas si mal que ça !

Elena 2009

 

 

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